Wednesday, June 29, 2022

82ème anniversaire du massacre de Chasselay

Le 20 juin 1940, au nord de Lyon, dans le village de Chasselay, 48 tirailleurs sénégalais du 25e RTS furent assassinés par des militaires allemands, très probablement des SS (le 19 juin, 8 soldats et officiers français de ce régiment avaient déjà été tués à Lissieux, juste à côté de Chasselay). Les chars allemands broyèrent les corps des soldats coloniaux.

Depuis 1942, à l’initiative d’un habitant de la région, monsieur Jean Marchiani, directeur de l'Office Départemental des Anciens Combattants, ils furent enterrés dans un cimetière unique en Europe, le Tata : ses murs sont de couleur ocre rouge, ils sont d’architecture soudanaise. « Tata » signifie « enceinte sacrée » où reposent les guerriers morts au combat. Le Tata de Chasselay, où désormais 198 tombes sont rassemblées, est devenu nécropole nationale. Chaque année, fin juin et le 11 novembre, ont lieu au Tata des cérémonies de commémoration en l’honneur de ces soldats.

En 1992, fut produit un très beau film documentaire, Le Tata -Paysages de pierres [1]. Il reste malheureusement encore trop peu connu ; il est le résultat d’un véritable travail d’enquête historique sur ce qui s’est passé, et les auteurs ont pu interroger plusieurs témoins, aujourd’hui disparus.

Au début des années 2000, alors que j’engageais mes recherches sur l’histoire des tirailleurs sénégalais et sur les traces que leur présence en France avaient laissées, j’avais eu la chance de rencontrer à Chasselay madame Suzanne Russier, qui habitait le village et avait 10 ans à l’époque des combats dans le Lyonnais et du massacre dans le village. Elle n’oublia jamais cette sanglante journée du 20 juin et elle avait écrit des poèmes dédiés aux tirailleurs assassinés.

En janvier et en février 2022, l’Ahtis a évoqué sur son blog le Tata de Chasselay : le 27 janvier une plaque portant les noms de 25 tirailleurs sénégalais fut apposée sur le mur d’enceinte du Tata lors d’une cérémonie officielle présidée par madame Darrieussecq, ministre déléguée à la Mémoire et aux Anciens combattants. Notre billet de février précisait que contrairement aux annonces initiales, l’identification de ces 25 tirailleurs ne résultait pas de « recherches génétiques », mais ainsi que me l’avait communiqué l’historien Julien Fargettas [2], d’études menées par lui sur des archives locales. A ce jour, la nature de ces recherches et les modalités de l’identification des 25 soldats coloniaux ne sont toujours pas clarifiées. C’est regrettable et propice aux interrogations ; en témoignent l’article publié sur le site d’information Médiapart [3] par l’historienne Armelle Mabon et un reportage diffusé sur la chaîne Al Jazeera..

Le souvenir des combats dans le Lyonnais revient dans l’actualité dans d’autres localités. Ainsi, dans la commune de Marcy-L’Etoile, située au nord-ouest de Lyon, la municipalité a honoré par une stèle, au printemps 2022, Mahang Sarr, tirailleur sénégalais fusillé sur le territoire du bourg le 20 juin 1940. Une exposition sur l’histoire des tirailleurs sénégalais fut présentée à la médiathèque et le film Le Tata -Paysages de pierres fut projeté.

Il n’y a plus aujourd’hui de témoins de ces douloureux événements ; cependant, l’intérêt pour ce passé, dans toute sa complexité, est à l’ordre du jour.

Françoise Croset        

[1] Réalisé par Patrice Robin et produit par Eveline Berruezo. Pour tout contact afin de voir le film, le lien est : http://tirailleurs-senegalais.fr.

[2] Julien Fargettas a publié en 2020 un livre sur les combats de juin dans la région de Lyon et sur le massacre de Chasselay, Juin 1940. Combats et massacres en Lyonnais, éd du Poutan.

[3] Armelle MABON, BILLET DE BLOG 19 JUIN 2022, Hommage ou outrage? https://blogs.mediapart.fr/armelle-mabon Et reportage sur la chaîne Al Jazeera https://www.facebook.com/ajplusfrancais/videos/404979441579594

 

Monday, June 27, 2022

Le photographe Wareen Sarré, auteur d'un travail sur les tirailleurs sénégalais, a été photographié à son tour :



Exposition

Un grand photographe africain photographié par les élèves du collège Cabanis de Brive (Corrèze) 

Publié le 20/06/2022 à 10h20

Quelques-uns des Troisièmes 4 qui ont participé au projet. Photo Justine Bavois. © Justine Bavois

Les élèves de troisième du collège Cabanis de Brive (Corrèze) ont photographié un photographe, Waren Sarré, à l’origine d’un travail artistique et historique exceptionnel sur les tirailleurs sénégalais.

Pour une fois, le photographe n’est pas derrière, mais devant l’objectif. Ce jeudi 9 juin, dans le hall du collège Cabanis, à Brive (Corrèze) était présentée l’exposition de portraits de Waren Sarré, réalisés par les élèves de Troisième 4, encadrés par leurs enseignants d’arts plastiques, d’histoire et de français, et la documentaliste du collège.

Il a sorti de l'oubli les tirailleurs africains

Cet artiste burkinabé est l’auteur d’un travail photographique et historique exceptionnel sur les tirailleurs africains dits « sénégalais » qui a été exposé, en partie, au Musée Michelet du 10 septembre 2021 au 9 janvier 2022 sous le titre Les invisibles.

Waren Sarré est aussi le premier photographe à avoir été invité en résidence d’un mois à Brive en septembre dernier. À cette occasion, celui qui se définit comme un « artiviste » a rencontré les collégiens de Cabanis trois fois.

« Initialement, c’est Waren qui devait faire des portraits de collégiens, mais, finalement, ça a donné un travail sur le portrait photographique et c’est lui qui a accepté d’être le modèle. Avec Waren, les élèves ont appris quelques notions de prise de vue photographique. Puis, le projet s’est poursuivi par l’organisation de l’exposition, » explique la professeure d’arts plastiques, Emmanuelle Marfaing.

 

Les collégiens ne tarissent pas d'éloges à l'égard de Waren Sarré. Photo Justine Bavois.

Un message de fraternité 

L’exposition des collégiens est composée d’une cinquantaine de portraits de Waren Sarré, mais aussi de leurs recherches autour de l’histoire des tirailleurs sénégalais. Les jeunes ont également noté leurs impressions après leurs rencontres avec l’artiste. Ils ont été très impressionnés par la personnalité de celui qui a pour devise : « Un monde meilleur, un devoir de mémoire ».

Les collégiens ne tarissent pas d’éloges à son égard : « Il nous a donné beaucoup de conseils et nous a parlé de sa vie. C’est quelqu’un qui a une grande joie de vivre et porte un message de fraternité. Il a appris le français tout seul pour pouvoir faire ses recherches historiques. »

Dragan Perovic 

Un grand photographe africain photographié par les élèves du collège Cabanis de Brive (Corrèze) - Brive-la-Gaillarde (19100) (lamontagne.fr)



Pour en savoir plus sur le photographe Warren Sarré :


Photo: le burkinabè Warren Sarré, ou l’art de «rendre les invisibles, visibles» - Invité Afrique soir (rfi.fr)



A noter :


Didier Bergounhoux avait réalisé une exposition sur les tirailleurs burkinabé, et est l'auteur d’un premier documentaire tourné à Ouagadougou et Bobo Dioulasso à la rencontre des derniers combattants burkinabés (La Reconnaissance, 2005, qu’il a écrit et coréalisé avec Claude Hivernon), diffusé par France Télévisions ; producteur délégué : Les Productions de la Lanterne


L'AHTiS vous informe de la parution d'un livre sur l'histoire des Tirailleurs sénégalais :



Présentation éditeur :

« Si les études portant sur le rôle des tirailleurs sénégalais durant les deux conflits mondiaux sont légion, rares sont les livres qui retracent toute leur histoire, de leur création par décret impérial en 1857 à leur disparition en 1960 après la dissolution de l’A-ÉF et de l’A-OF. Pourtant, ce corps d’armée – qui désigne en réalité tous les soldats africains de couleur qui se battent pour l’Empire – fait partie intégrante de l’histoire de France. En effet, de la conquête de Madagascar en 1895 aux guerres d’indépendance (Indochine, Algérie…) en passant bien sûr par les Première et Seconde Guerres mondiales, ces troupes coloniales sont de tous les combats.
Mais comment l’état-major français considère-t-il les tirailleurs pendant un siècle ? De quelle façon son attitude évolue-t-elle au fil des années ? En quoi influence-t-elle celle de l’opinion publique
métropolitaine qui, pendant longtemps, ne voit en ces soldats que la personnification du célèbre slogan « Y a bon » de la marque Banania ? Revenant sur les moments de gloire (la défense de Reims en 1918, la bataille de Bir Hakeim en 1942, etc.) autant que sur les tragédies (les exactions commises par la Wehrmacht en 1940 ou encore le massacre de Thiaroye en 1944), Anthony Guyon répond à toutes ces questions parmi beaucoup d’autres. Partant, il propose la première synthèse complète et nuancée sur cette armée mythique et, surtout, sur les hommes qui la composent. S’intéressant aux trajectoires collectives mais aussi aux destins individuels (tels ceux de Lamine Senghor ou Addi Bâ), il bat en brèche les poncifs récurrents et rend aux tirailleurs sénégalais la place qu’ils méritent dans l’histoire. »

Enseignant agrégé et docteur en histoire, Anthony Guyon a consacré sa thèse aux tirailleurs sénégalais de 1919 à 1940. Ses travaux reposent notamment sur l’étude du fonds de Moscou au SHD de Vincennes et de celui de nombreux centres d’archives dans le sud de la France.

Un tirailleur guinéen raconte sa guerre à une collégienne






Près de 80 ans après la fin de la Seconde guerre mondiale, il ne reste plus beaucoup des dizaines de milliers de "tirailleurs sénégalais" qui ont combattu pour la France. Comment transmettre la mémoire de ces combattants auprès de la jeune génération ? Une collégienne de Conakry est allée interroger un des derniers vétérans guinéens, âgé de 96 ans.