Saturday, May 09, 2020

Danièle Capot ressuscite le souvenir de deux tirailleurs sénégalais enterrés près de Neufchâtel-en-Bray




Danièle Capot ressuscite le souvenir de deux tirailleurs sénégalais enterrés près de Neufchâtel-en-Bray

Danièle Capot vient d'exhumer l'histoire de deux tirailleurs sénégalais tués en juin 1940 et enterrés à Esclavelles. Pour ce 8 mai, le Souvenir français revient sur cette histoire.




Danièle Capot a retrouvé l'histoire de ces deux tirailleurs sénégalais tués à Esclavelles lors de la campagne de 1940.
Danièle Capot a retrouvé l’histoire de ces deux tirailleurs sénégalais tués à Esclavelles lors de la campagne de 1940. (©Danièle Capot)

Danièle Capot, déléguée générale adjointe et présidente du Souvenir Français de Neufchâtel-en-Bray aime les missions impossibles. Retrouver l’histoire de deux tirailleurs sénégalais morts en pays de Bray en 1940 en était une. Elle vient d’écrire un article sur ce sujet.

« Une photo trouvée par l’abbé Savarin »

La présidente du Souvenir français est une habituée des archives et notamment de ceux du Réveil qu’elle consulte régulièrement dans le cadre de ses recherches.
Mais cette fois, il n’y avait aucune information sur ces deux tirailleurs tués près de Neufchâtel-en-Bray. Et pour cause, nous sommes en 1940.
La période est troublée. Mais Danièle Capot ne renonce pas. Elle vient de rédiger un récit complet de cette histoire oubliée.
« Une photographie trouvée par l’abbé Sébastien Savarin dans l’église d’Esclavelles m’a été confiée afin d’effectuer des recherches sur les deux personnages photographiés. En bas de cette photographie, on devine quelques mots devenus presque illisibles : Soldats Sénégalais fusillés par les Allemands au château…. le 22 juillet 1940 Bernard OLI et un inconnu ».
Qui étaient ces soldats sénégalais venus en pays de Bray ? La question a le mérite de piquer la curiosité de la présidente du Souvenir français.
« Des recherches que j’ai entreprises à la mairie d’Esclavelles avec M. Vielle, président des anciens combattants, m’ont permis de rassembler un certain nombre d’éléments ».

« Des soldats exécutés en juillet 40 »

Danièle Capot se plonge dans les archives municipales d’Esclavelles. Et là, elle fait une découverte essentielle.
« D’abord, la lecture des registres de délibération du conseil municipal révèle que, le 23 juin 1941, le maire, M. Henri Carpentier, expose au conseil que des soldats sénégalais ont été exécutés en juillet 1940 par des éléments d’une unité allemande d’aviation en cantonnement au hameau des Hayons ».
Voilà déjà une première étape vers la vérité. Mais le chemin est encore long. Danièle Capot veut en savoir plus sur ces deux soldats dont l’histoire semble avoir oublié le sacrifice.
Constatant que l’unité ayant quitté la commune, Henri Carpentier ajoute :
« il importe de donner à ses victimes de la guerre une sépulture décente dans le cimetière communal ».

« Des très durs combats à Airaines »

Ainsi, le conseil vote un crédit de 1600 francs après cette délibération afin de payer les dépenses d’exhumation et de réinhumation des deux corps. « A cette somme, s’ajoute la participation du secrétariat des anciens combattants à hauteur de 420 francs ».
Il reste alors à Danièle Capot de nombreuses questions. Alors elle poursuit son enquête.
« Les registres d’état civil nous apprennent que les décès de Bernard Oli et d’un Sénégalais inconnu sont inscrits quelques jours plus tard, le 26 juin 1941. Ils précisent qu’il a été
« procédé à l’exhumation et réinhumation de soldats sénégalais exécutés à la mi-juillet 1940 aux Hayons à proximité du château appartenant à M. Jean Guélot. D’autres détails sont donnés sur les deux soldats décédés : Bernard Oli Ziguinchor Casamance. Il portait le matricule 33959-1934, sur lequel a été inscrite à titre posthume la mention marginale : Mort pour la France. L’inconnu portait pour sa part un écusson numéroté 53 ».
Autant d’éléments qui vont permettre à Danièle Capot de dérouler le fil de l’histoire. Elle écrit :
« Il est dès lors vraisemblable que ces tirailleurs sénégalais appartenaient au 53e Régiment d’Infanterie Coloniale Sénégalais (RICMS), régiment qui participa avec la 5e division à la Bataille de France sur le front de la Somme. Il est par ailleurs connu que les tirailleurs de ce régiment menèrent de très durs combats à Airaines les 5, 6 et 7 juin 1940 où ils furent anéantis malgré leur résistance désespérée, et qu’en représailles, les Allemands procédèrent à des exécutions sommaires ».


Danièle Capot a photographié les tombes des deux tirailleurs sénégalais
Danièle Capot a photographié le monument où se trouve le nom de Bernard Oli, l’un des deux deux tirailleurs sénégalais (©Danièle Capot)

L’histoire des tirailleurs sénégalais qui ont combattu dans la Somme est assez bien connue. Et pour la présidente du Souvenir français de Neufchâtel-en-Bray, l’énigme est enfin levée. Elle détaille :
« Il est probable que ces tirailleurs se soient échappés du massacre de Drosmenil du 8 juin 1940, où 123 soldats sénégalais furent fusillés par les Allemands, comme le rappelle le Réveil du 3 juin 1988. D’ici, ils ont pu se réfugier à Esclavelles (50 km séparent Dromesnil d’ Esclavelles), où ils ont dû être fusillés par une unité d’aviation allemande en cantonnement aux Hayons ».

« Que leur tombe soit rénovée »

Désormais, plus personne ne peut ignorer le sacrifice de Bernard Oli et son compagnon d’armes. Et leurs tombes devraient retrouver les honneurs qu’elles méritent.
Dans son article, Danièle Capot conclut :
« Pour sa bravoure et son efficacité dans la Bataille de France, le drapeau du 53e RICMS a reçu l’inscription Airaines 1940. Cette distinction est exceptionnelle : les inscriptions attribuées au titre de la campagne de 1940 furent en effet peu nombreuses ».
Et de poursuivre :
« Aujourd’hui, nous pouvons toujours constater que le nom de Bernard Oli et la mention du soldat inconnu sont apposés sur une plaque devant le Monument aux Morts de la commune d’Esclavelles. Le président des anciens combattants et notre comité forment le souhait que leur tombe au cimetière d’Esclavelles soit rénovée en hommage à ces combattants de la France ».
Affaire à suivre.

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