Sunday, March 22, 2020


Une table-ronde sur le thème des tirailleurs sénégalais à Lille

Lundi 24 février, s’est tenue à l’Ecole de Sciences Po/Lille une table ronde, dont le thème était « Tirailleurs Sénégalais, Histoire et Mémoire ». L’initiative en revient à des étudiants de l’association Méla’Lille, association « qui met en avant les cultures et identités afro-caribéennes et sensibilise aux questions raciales. » La table-ronde s’inscrivait dans le cadre de la semaine « Black History Week[1] », « L’histoire des Noir.e.s en France », qui s’est tenue à Sciences Po/Lille du 24 au 28 février 2020.
J’ai eu l’opportunité d’aller assister à la table-ronde, avec Djibril Ndiaye, de l’AHTiS.
L’assistance était composée d’une soixantaine d’étudiants de l’école, et de quelques professeurs de celle-ci. Quelques personnes extérieures, comme nous, étaient aussi venues. Ainsi un habitant de la ville belge de Dixmude, membre actif d’une association d’histoire locale.
A la table, siégeaient six intervenants : le président de l’association Le Souvenir Français[2], Serge Barcellini ; l’historienne Armelle Mabon ; le journaliste Etienne Guillermond ; Marcel Lourel, initiateur de la lettre ouverte aux maires et aux municipalités pour attribuer à des rues les noms de combattants coloniaux de la 2e guerre mondiale ; Sira Sylla, députée de la Seine-Maritime, et Hamidou Samaké, adjoint au maire du 20e arrondissement de Paris.
Chacun intervint à tour de rôle, et le temps étant limité, il n’y eut pas vraiment de débat entre les intervenants. 
Retenons notamment les propos d’Armelle Mabon, qui après avoir rappelé son travail de recherche historique sur l’histoire des prisonniers de guerre coloniaux de 1940 à 1945 et sur le massacre de Thiaroye en décembre 1944, a souligné l’enjeu qu’il y a encore à faire toute la lumière sur ce massacre et à obtenir la localisation des dépouilles des tirailleurs tués, leur nombre exact, leurs noms, et à obtenir la réhabilitation des soldats condamnés après Thiaroye. 
Marcel Lourel a encouragé les étudiants à « s’emparer de la question historique » des combattants coloniaux dans la deuxième guerre mondiale. Il nous a par ailleurs informés que le village d’Arleux, situé dans le département du Nord, avait honoré un de ses habitants, Abel Adelbaki, ancien combattant d’origine algérienne de l’armée française, âgé aujourd’hui de 101 ans. Durant la deuxième guerre mondiale, il a participé aux combats de la libération, notamment fin 1944 dans les Vosges ; ensuite il servit en Indochine et en Afrique du Nord. Son nom a été donné à un square de la commune. 
Etienne Guillermond a expliqué qui était Addi Bâ et a incité les jeunes gens, les étudiants, à aller chercher eux-mêmes l’histoire dans les archives. « C’est possible, et cela a du sens », dit-il.
Serge Barcellini a proposé une périodisation de ce que fut la mémoire des tirailleurs sénégalais en France [3]. Le temps fut trop court malheureusement pour ouvrir la discussion sur cette périodisation.
Les deux élus ont chacun expliqué comment ils soutenaient les initiatives pour faire connaître l’histoire des soldats coloniaux.
Faute de temps, il n’y eut que quelques interventions du public. Un journaliste d’Afro New TV a tenu à faire connaître le nom du capitaine Charles N’Tchoréré, officier français d’origine gabonaise, qui combattit dans la Somme face à l’offensive allemande et fut assassiné par des militaires allemands le 7 juin 1940 après avoir été fait prisonnier.[4] Le tour de parole dans la salle fut pour nous l’occasion de faire connaître le travail de l’AHTiS. Chaque auditeur a d’ailleurs pu partir avec un flyer de l’association.
Les étudiants présents ont manifestement été intéressés, et ce fut un moment instructif. Il y aurait sûrement matière à débattre ultérieurement. Mais il faut saluer une initiative encourageante.
Pour finir, nous avons noué contact avec mr Bascour, qui habite Dixmude en Belgique, et est membre actif de l’association d’histoire locale « L’Alloeu terre de batailles 14-18 »[5] : son association recherche des traces de la présence des tirailleurs sénégalais dans le secteur de Nieuport et Dixmude en octobre et novembre 1914. Des restes humains ont été retrouvés dans le secteur, il y a quelques mois, et les archéologues se renseignent sur les tirailleurs. En effet, des boutons d’uniforme portant une ancre de marine ont été découverts. Nous avons pu par la suite communiquer à mr Bascour les pages du livre Héros Méconnus, publié en 1993 par Maurice Rives et Robert Dietrich, pages qui concernent ces combats.

Françoise Croset


[1] La « Black History Week » est organisée en France en référence au « Black History Month », une commémoration annuelle de l’histoire de la diaspora africaine célébrée aux Etats-Unis depuis 1976, ainsi qu’au Canada, et au Royaume Uni plus récemment.
[2] Le Souvenir Français fut créé en 1887, à la suite de la guerre franco-allemande de 1870, avec pour mission de perpétuer le souvenir des soldats morts pour la France ; il prend en charge l’entretien des tombes et des monuments commémoratifs liés aux guerres.
[3] https://le-souvenir-francais.fr/
[4] Voir le bulletin N° 4-5 de l’AHTIS.
[5] https://www.facebook.com/lalloeuterredebatailles19141918/

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