Monday, November 07, 2022

 

L'histoire méconnue des Tirailleurs sénégalais, soldats qui ont servi pendant la Première Guerre mondiale

1.137 soldats coloniaux reposent dans les carrés militaires du cimetière du Trabuquet qui surplombe le vieux Menton. Un hommage leur a été rendu hier. Voici leur histoire.

Célia Malleck  Publié le 02/11/2022 à 12:45, mis à jour le 02/11/2022 à 11:22

C’est Gaspard Mbaye (de dos) qui a permis de retrouver l’identité et le pays d’origine de ces Tirailleurs enterrés à Menton. Son association a permis la création d’un mémorial, il y a tout juste 10 ans. Photo C. M.

C’est un passage obligé. À chaque Toussaint, la Ville de Menton rend hommage aux soldats coloniaux morts pour la France. Dans la cité, 1.137 Tirailleurs sénégalais, maliens, guinéens, burkinabés, malgaches ou encore indochinois sont enterrés au cimetière du Trabuquet.

Ils ont tous servi sous le drapeau tricolore lors de la Première Guerre mondiale et se sont éteints sur les bords de la Méditerranée, dans les hôpitaux militaires mentonnais.

Pendant 80 ans, leurs noms et leur sacrifice avaient été oubliés jusqu’à ce qu’un prof d’histoire exhume leur mémoire et mette au jour le plus important carré militaire après Fréjus.

Durant 80 ans, l’existence de ces soldats tombés pour la France lors de la guerre de 14-18 avait été en partie oubliée. Photo C. M.

4 à 6 corps dans une même tombe

C’était il y a dix ans, mais Gaspard Mbaye s’en souvient comme si c’était hier. Le 1er novembre 2012, le président de l’association mémoire Tirailleurs sénégalais (AMTS) inaugure le monument aux Morts en présence du Souvenir Français, de la Ville, du Département et de la Région ainsi qu’un représentant du président de la République du Sénégal. L’aboutissement d’un combat qui dura quatre ans.

Depuis la création de son association en 2008, l’enseignant et fils de Tirailleur sénégalais milite pour la création d’un mémorial. Il s’est plongé dans les archives municipales et les registres de l’armée française. Il a écumé les fosses communes du Trabuquet à la recherche des dépouilles. "Il y avait des noms qui manquaient, raconte Gaspard Mbaye. Plusieurs soldats étaient enterrés dans la même tombe [au carré d’Orient, par exemple, certaines peuvent contenir 4 à 6 corps, ndlr], mais seul le nom du dernier inhumé était marqué sur la stèle."

Ses recherches lui permettent d’identifier 1.137 soldats dont les noms sont aujourd’hui gravés sur vingt plaques commémoratives dans le carré Champagne. L’historien découvre qu’ils ont combattu dans les tranchées, dans l’Aisne, la Somme ou encore à Verdun, avant d’être envoyés à Menton pour être soignés.

Après la Ville de Menton et l’association mémoire Tirailleurs sénégalais, l’association Nice Madagascar a déposé une gerbe en hommage aux soldats malgaches enterrés au Trabuquet. Photo C.M.


Des soldats soignés à Menton

Entre 1914 et 1920, les soldats blessés ou malades du front occidental étaient évacués par des trains sanitaires jusque dans le Sud-Est de la France. Fréjus et Menton sont les camps les plus importants. Dans la cité du citron, les premiers blessés de la Grande Guerre sont soignés au collège de Menton. L’hôpital de 50 lits est vite débordé, les hôtels sont réquisitionnés. C’est le cas du Louvre, de l’Alexandra, qui sera réservé aux tuberculeux ou soldats atteints de maladies contagieuses, ou encore du Carlton, qui deviendra un laboratoire de recherche sur les techniques chirurgicales et sur le matériel opératoire. Certains repartiront au front, mais beaucoup d’entre eux mourront à Menton.

"On devait honorer leur mémoire", estime Gaspard Mbaye qui vient déposer chaque Toussaint une gerbe de fleurs au pied de la statue du Tirailleur sénégalais. Comme l’association Nice Madagascar venue rendre hommage aux 156 Tirailleurs malgaches inhumés au Trabuquet.

"C’est notre mission de ne pas les oublier", dira le curé Régis Peillon. "Notre mission est d’entretenir leurs tombes, conclura Rémy Delaunay, le président du Souvenir français de Menton. Ces tombes, c’est notre histoire. À nous le souvenir, à eux l’immortalité."

L'histoire méconnue des Tirailleurs sénégalais, soldats qui ont servi pendant la Première Guerre mondiale - Nice-Matin

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